Qui n’a pas frotté un ballon sur les cheveux pour les voir s’en tenir à un mur par la suite? Cette expérience d’enfance illustre la triboélectricité, un phénomène dans lequel un simple contact ou frottement provoque un transfert de charge électrique entre deux matériaux. Bien que familières dans la vie quotidienne, ses mécanismes sont encore mal compris. Encore plus surprenant, ce processus ne se limite pas aux solides. Il peut également se produire lorsqu’une gouttelette d’eau glisse sur une surface hydrophobe – un cas unique de «Triboélectrification liquide».
Une équipe de chercheurs [1] a maintenant jeté la lumière sur ce phénomène en utilisant une technique de cartographie électrostatique sans précédent, capable de suivre les charges laissées dans le sillage d’une gouttelette au fil du temps et de l’espace. Les résultats sont frappants: plutôt que de rester confinés à la piste initiale, ces charges se propagent rapidement sur toute la surface. Leur mobilité latérale est si élevée qu’elle dépasse même celle des ions dans une solution aqueuse, contrairement au ralentissement attendu dû au contact avec le solide.
Les simulations menées à côté de ces expériences révèlent que ces charges correspondent à des ions hydratés piégés à l’interface. En d’autres termes, chaque ion reste entouré d’une fine coquille de molécules d’eau qui l’isèle partiellement du substrat. Dans cet état unique, surnommé une «flaque ionique», l’ion glisse littéralement sur la surface, limité uniquement par la friction entre sa coquille d’hydratation et le substrat. Ce frottement interfacial, beaucoup plus bas que prévu, explique la vitesse de diffusion extraordinaire observée.
Une autre surprise: la propagation des charges ne dépend pas de leur densité. Les ions se déplacent indépendamment les uns des autres, sans se repousser, indiquant que le processus est entièrement régi par l’interaction avec la surface. De plus, en ajustant le pH de l’eau, il est possible de modifier à la fois le signe et l’ampleur de la charge déposée, confirmant l’implication directe des espèces ioniques dans la gouttelette.
Ces résultats révèlent un nouvel état de matière, appelé «flaque ionique», où les ions hydratés se comportent comme des particules presque libres malgré leur piégeage à la surface. Ils fournissent de nouveaux informations sur la triboélectrification entre les solides, qui peuvent provenir du transfert de films d’eau chargés nanométriques. À long terme, la compréhension de la dynamique de ces «flaques d’eau ioniques» pourrait inspirer les progrès des nanofluidiques, de l’électronique ionique ou même de la conception de récolteurs d’énergie en fonction du mouvement des gouttelettes.
Source: École Supérieure de Physique et de Chimie Industrieles de la Ville de Paris
Qui n’a pas frotté un ballon sur les cheveux pour les voir s’en tenir à un mur par la suite? Ce
Publié à l’origine dans The European Times.