Dans le cadre de la révision en cours de la réglementation vitivinicole européenne, les États membres de l’UE, à l’exception de la Belgique, ont approuvé une proposition visant à autoriser la mention « faible teneur en alcool » (‘low-alcohol’ en anglais) pour les vins dont la teneur en alcool a été réduite.
Conséquence : les vins contenant jusqu’à 6 % d’alcool, soit l’équivalent de nombreuses bières, pourraient bientôt être étiquetés comme étant à « faible teneur en alcool ».
« Faible teneur en alcool » est une tromperie au détriment de notre santé
Autoriser l’emploi du terme « faible teneur en alcool » pour les vins contenant jusqu’à 6 % d’alcool constitue un précédent dangereux dans la législation alimentaire de l’UE.
Jusqu’à présent, l’utilisation du terme « faible teneur » est strictement liée à un bénéfice présumé pour la santé : « faible teneur en sel », « faible teneur en matières grasses » ou « faible teneur en sucres ». Ce terme n’est autorisé que lorsqu’un seuil maximal est respecté qui garantit que le produit contient réellement une faible quantité de la substance en question. Appliquer cette même mention à un vin contenant jusqu’à 6 % d’alcool, sans seuil garantissant un bénéfice pour la santé, rompt totalement avec cette approche.
Cela est d’autant plus préoccupant compte tenu des preuves scientifiques croissantes du lien entre l’alcool et cancer, par exemple le cancer du sein.[1]
Un sérieux revers pour les efforts de santé publique
Aucun niveau de consommation d’alcool n’est sans danger pour notre santé[2]. Et plus vous buvez, plus le dommage est grand.
Qualifier un vin contenant jusqu’à 6 % d’alcool de « faible en alcool » est inexact et dommageable. Cela crée un faux sentiment de sécurité et contribue à banaliser la consommation d’alcool, en particulier parmi les personnes sensibles aux récits commerciaux. Cette qualification induit donc les consommateurs en erreur et suggère un niveau de sécurité qui n’existe tout simplement pas. Cela sape les protections de la santé des consommateurs mises en place de longue date et pourrait ouvrir la voie d’autres formes de manipulation.
Pour pouvoir faire des choix éclairés, les consommateurs méritent une information claire et factuelle, non une stratégie marketing déguisée en réglementation. Les pouvoirs publics ont la responsabilité de garantir cette information.
« Teneur réduite en alcool », une mention honnête, factuel et cohérente
On peut saluer la réduction de la teneur en alcool et il faut respecter le droit de chacun de faire ses propres choix, mais il revient aux autorités publiques de veiller à ce que ces choix puissent se fonder sur une information fiable et véridique.
Il existe déjà une alternative claire et précise : « Teneur réduite en alcool ». Cette notion « Teneur réduite en [x] » existe dans la législation de l’UE depuis 2006 et est utilisée dans l’ensemble du secteur alimentaire. Elle décrit les produits dont la teneur en une substance a été réduite, sans suggérer qu’elle est faible en termes absolus ou que le seuil est bénéfique pour la santé.
Pourquoi le vin devrait-il être exempté des normes qui s’appliquent à tous les autres aliments et boissons? Seule la mention « teneur réduite en alcool » peut garantir aux consommateurs une information fiable et véridique et assurer une cohérence au sein de la législation européenne sur l’étiquetage des denrées alimentaires.
Le dossier est au Parlement européen
La balle est maintenant dans le camp du Parlement européen. La Belgique espère qu’il sera également en faveur de la santé publique et qu’il utilisera les négociations avec le Conseil pour convaincre les autres États membres et la Commission européenne que la seule alternative honnête et acceptable est « teneur réduite en alcool ».
Les autorités publiques ont le devoir de préserver l’intérêt général et de garantir un niveau élevé de protection de la santé pour tous les citoyens.
Note d’information technique : https://www.health.belgium.be/fr/note-dinformation-sur-la-communication-faible-teneur-en-alcool
[1] 1 Rumgay H, Shield K, Charvat H, Ferrari P, Sornpaisarn B, Obot I, et al. Charge mondiale du cancer en 2020 imputable à la consommation d’alcool: une étude basée sur la population. Lancet Oncol. Publié en ligne le 14 juillet 2021. https://doi.org/10.1016/S1470-2045(21)00279-5
[2] https://www.who.int/europe/news/item/04-01-2023-no-level-of-alcohol-consumption-is-safe-for-our-health